Trois mois sur le chemin

Trois mois que je suis parti.
Trois mois dans mes pensées.
Trois mois seul à vivre cette aventure.

Je n’ai parcouru “que” la moitié du GR34. Que la moitié, c’est 1100 kilomètres sur 2100 km. Je n’avais jamais marché autant de jours. Pas de performance, ni de record à battre, juste un chemin que j’ai suivi. Plus qu’un chemin, je dirais un cheminement. Je me suis laissé porter par mes pas, abandonnant petit à petit mon programme que je m’étais fixé pour lâcher prise.

Je ne suis pas arrivé au bout du GR34, mais je pense être arrivé au bout de mon envie. Si je dois être honnête avec moi-même, je n’ai plus envie de marcher.

Est-ce grave ?

Non, car je viens de vivre une des plus belles expériences de ma vie. Une aventure inoubliable faite de rencontres, de joie, de pleurs et de moments puissants qui sont gravés dans ma mémoire.
Comment ne pas être touché par l’accueil des bretons et bretonnes qui m’ont ouvert leur porte, mais surtout leur coeur ?

J’ai pleuré de bonheur. C’était tellement bon. Je me suis senti vivant, présent, connecté à moi et à mes semblables. J’ai fêté la vie. Tout me rappelait la chance que j’avais d’être sur Terre. Tout m’émerveillait, du bruit des vagues aux chants des oiseaux, aux milles et une couleurs de la mer jusqu’au vent qui s’engouffre dans les arbres, en passant par tous les clins d’oeil que la vie me laissait. J’ai aimé tous ces hasards (étaient-ce des hasards?), toutes ces rencontres fortuites. Oui, la vie est belle ! Ce chemin m’a rappelé la chance que j’ai de pouvoir vivre et d’être là sur cette Terre. Quand tu te réveilles quotidiennement au son de la Nature, comment ne pas apprécier son existence ?

Mais c’est vrai que le confort me manque, surtout celui de changer de caleçon et de mettre des affaires propres. Vous savez pas ce que ca fait de porter tous les jours depuis 3 mois le même short (Merci Cimalp, tous les vêtements ont survécu !), et de tourner avec seulement 3 t-shirts et 3 caleçons, surtout quand il pleut 4 jours d’affilée ou à l’inverse qu’il fait 40 degrés ! Sans parler de mon matelas gonflable qui a rendu l’âme il y a plus d’un mois.. J’ai eu beau essayé de le réparer, chaque matin je le retrouve complètement dégonflé.

Et puis, il y a toujours des douleurs physiques qui ne veulent pas partir malgré le soin que j’essaye d’apporter à mon corps. Elles ne sont pas très intenses, mais elles sont là. Je sens que mes tendons ont besoin d’un long repos, qu’il faut que j’arrête de les solliciter pendant quelques temps.

Mais honnêtement, ce n’est pas le manque de confort qui me pousse à arrêter, c’est plutôt qu’après trois mois, j’en ai marre de manger des crêpes tous les jours ! Non, je rigole, je pourrais continuer d’en manger matin, midi et soir ahah !

Non, la réalité, c’est qu’au bout de trois mois de marche, j’ai la sensation d’avoir fait le tour de moi-même, à défaut du tour de la Bretagne.

Tout le monde marche pour une raison, que ce soit Saint Jacques de Compostelle ou le Sentier des Douaniers, c’est avant tout un cheminement personnel. Je voulais expérimenter la marche au long cours pour découvrir de nouvelles choses. J’ai eu mon lot de réponses, mais aussi celui de nouvelles questions. J’ai écrit dans mon journal de bord tous les jours pour me souvenir de chaque moment, de chaque sensation, de chaque rencontre, de chaque pensée.

À présent, je ressens un besoin immense de me poser pour replonger dans ce voyage et écrire, mettre des mots sur cette aventure, comprendre, partager mon ressenti.

Il est donc temps pour moi de faire une pause.

Combien de temps ?

J’en ai aucune idée. Je repartirai quand le corps sera prêt et quand l’envie sera à son maximum. Peut être dans un an, dans deux ou dix, peu importe. Je sais juste que je reviendrais terminer le GR34 avec l’envie de découvrir encore et encore cette belle Bretagne et ses bretons.

Bon vent et Kenavo !